une petite pensée

Il était une fois une petite pensée qui était passée tout près de la chaleur du coeur mais elle ne s’y était pas arrêtée, elle avait continué sa route grimpant le long des murs des mots, tournant en rond dans le carré de la boîte noire et savante de sa lourde tête. Oserait-elle un jour s’aventurer ailleurs?

Alors qu’elle avançait selon ses habitudes elle chuta sur un petit bout d’âme laissé là; elle se mit à tomber telle Alice dans le trou de l’arbre- elle prit peur d’autant plus qu’elle rencontra dans sa chute des visages inconnus et terrifiants, qu’elle entendit des météorites siffler autour d’elle, des montagnes s’écrouler avec fracas, des volcans exploser, elle vit des peuples disparaître, d’autres naître, elle survola des époques révolues, des futurs incertains, et bien des choses encore qu’elle sentait s’accumuler en elle comme autant d’informations disponibles dont elle aurait peut-être un jour la réminiscence- plus elle dérivait entre les mondes plus elle sentait quelque chose lui coller à la peau – un lambeau de chair blessée – peut-être même plusieurs- elle prit peur et se retrouva plonger dans une eau noire de haricot, un sang d’encre obscur, avec l’impression de n’être rien, elle eut alors l’intuition qu’elle venait de franchir un seuil et d’entrer dans un corps mais par quelle porte? elle même finalement d’où venait-elle? elle l’ignorait mais en regardant vraiment elle sut qu’elle flottait dans l’eau d’un rein; elle vit un peu plus loin des mouvements de colère terrifiants qui se logèrent avec agressivité dans un foie de bois; puis ailleurs beaucoup de tristesse accumulée depuis des temps inconcevables entravait le mouvement libre des poumons; la tête pensante s’était quant à elle réfugiée dans les ruminations maussades de la rate et du pancréas et le pauvre coeur ressentait un tel manque qu’il passerait sans doute sa vie à cacher les trouées par tous les voiles mentaux, émotionnels, intellectuels qui lui tomberaient sous la main. On rembobine dit le fil.

Il était une fois une petite pensée qui était passée tout près de la chaleur du coeur. Elle entendit l’oiseau à travers les barreaux de la cage chanter l’instant. Alors elle s’arrêta immédiatement près de ce feu de dieu – elle se mit à flamber de beauté dans des habits neufs, un enthousiasme radieux  la transfigura et la fit sautiller gaiement vers de nouveaux élans: la colère se métamorphosa en puissance créative; la peur en courage d’être; la tristesse en messages de gratitude infinie; les ruminations confuses en clarté sereine et le manque viscéral du coeur devint amour, joie et inclusion de toutes choses et de tout être.

Alors la petite pensée vit que son essence véritable était grande, immense, sans limites, elle découvrit qu’elle venait d’un pays de liberté qui tout embrasse, tout embrase, tout délivre et tout actionne. Elle se dit qu’il fallait vite aller propager cette histoire d’amour avant une future renaissance qui ne manquerait pas d’arriver, afin de ne pas entrer par n’importe quelle porte la prochaine fois, c’était certes un sujet sensible mais il fallait tenter l’expérience.

Comment faire? Elle décida de décider, elle décida de prendre le prochain instant puis le prochain instant et ainsi de suite, de répéter le geste neuf de l’ouverture jusqu’à ce qu’il devienne une seconde nature, et que sa véritable nature puisse se révéler à elle-même. Car elle en avait à présent l’intuition certaine, aucun effort ne pourrait la faire advenir seulement la simplicité du coucou.

2 commentaires Ajoutez le vôtre

  1. catia dit :

    WAOOUU !! Je ferme bien fort les yeux et le cœur battant j’espère bien la rencontrer cette petite pensée…!!! ;0)

    1. guilhem dit :

      coucou !

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