extrait de « the sanity we are born with – a buddhist approach to psychology », Ed. Shamballa – Chogyam Truyngpa traduit par wangmo.
Pour commencer, le point principal de la méditation est notre besoin de nous connaître nous-même : notre esprit, notre comportement, notre être. Nous pensons nous connaître, mais en réalité ce n’est pas le cas. Il y a tout un domaine inexploré de nos pensées et de nos actions. Ce que nous trouvons en nous-même pourrait se révéler tout-à-fait surprenant.
Méditation signifie souvent « méditer sur » quelque chose, mais ici je me réfère à un état sans aucun contenu. Pour faire l’expérience de cet état d’être, il est nécessaire de pratiquer ce qui est connu comme « pleine présence ». Vous faites simplement attention à votre respiration, à comment votre respiration entre et sort. Vous faites simplement attention à chaque détail de votre esprit, que ce soit une empreinte d’agression, de passion ou d’ignorance, ou juste un bavardage mental insignifiant. La pleine présence signifie aussi être attentif à tous les détails de chaque action. Par exemple, à la façon dont vous tendez votre main pour prendre un verre. Vous vous voyez vous même lever le verre, le porter à vos lèvres, et ensuite en boire l’eau.
Ainsi chaque détail est vu très précisément – ce qui ne vous rendra pas plus particulièrement conscient de vous-même, mais cela vous donnera peut-être un choc ; cela semblera plus réel.
Quand la pleine présence commence à croître et à s’amplifier, vous devenez plus attentif à l’environnement autour de vous, quelque chose de plus que juste votre corps et votre esprit.
Puis à un moment, la pleine présence et l’acuité fusionnent, cela devient comme un seul œil ouvert, une énorme précision se révèle. A partir de là, vous devenez beaucoup moins grossier. Parce que vous avez été plus attentif à vos pensées et vos actions, vous devenez plus fin.
En plus de cette précision et de cette finesse advient la gentillesse. Vous ne faites pas juste attention, mais vous êtes aussi vigilant à votre propre douleur et plaisir, et vous développez de la sympathie et de l’amitié envers vous-même.
De cette expérience, vous pouvez commencer à comprendre, ou tout au moins à voir, la douleur et la souffrance des autres, et vous commencez à développer une énorme sympathie envers autrui.
En même temps, la sympathie aide aussi le processus de pleine présence-acuité à se développer de plus en plus en profondeur. Fondamentalement, vous devenez une personne douce. Vous commencez à réaliser que vous êtes bon : totalement bon et totalement sain. Vous développez de la confiance en vous et dans le monde. Il y a quelque chose à quoi adhérer, la qualité de la voie ou du voyage émerge de cela. Vous sentez que vous pouvez faire quelque chose pour les autres et quelque chose pour vous-même. Il y a un sentiment de gentillesse, de bonté et d’authenticité universel.
Quand vous expérimentez la précision et la douceur, le monde phénoménal n’est plus perçu comme un obstacle ni comme particulièrement aidant. Il est vu et apprécié en tant que tel. A partir de là, vous êtes capable de transmuter les différentes souillures dues à la passion, à l’agression et à l’ignorance en état de sagesse. Par exemple, quand survient l’agression, vous regardez simplement l’agression, plutôt que de vous laissez emporter par elle ou d’agir sous son emprise.
Quand vous regardez l’agression elle-même, elle devient un miroir reflétant votre propre visage. Vous réalisez que l’agression n’a pas d’objet ; il n’y a rien qui puisse être agressé. L’agression elle-même s’apaise, mais la force de son énergie devient quelque chose de positif. Elle devient sagesse. Ici sagesse ne signifie pas le sens habituel d’être sage. La sagesse est l’absence d’ego, ou un état d’être, simplement être. L’ensemble du processus requiert une certaine dose de présence et d’acuité, évidemment. Mais vous développez naturellement une habitude à voir ce qui est souillé juste comme c’est, même si c’est très fugitif. Alors vous pouvez être libre de l’anxiété, et vous commencez à réaliser que cet état d’esprit n’a plus besoin d’être cultivé et qu’il ne peut pas être perdu non plus. Vous expérimentez un état naturel de ravissement. Ce n’est pas que vous soyez toujours rayonnant et heureux, ou que vous soyez dans une extase mystique. Vous ressentez la souffrance des autres personnes. Dans les textes, il est dit que la réceptivité du Bouddha à la douleur et à la souffrance d’autrui, en regard de la sensibilité d’une personne ordinaire, est comparable à la différence qu’il y a entre avoir un cheveu sur l’œil et avoir un cheveu dans la paume de sa main.
Ainsi le ravissement dans ce cas signifie la joie totale, un sens total de la plénitude.
Alors vous devenez capable d’aider les autres, vous êtes capable de vous aider vous-même, et vous êtes capable d’influencer l’univers, avec ce sens omni pénétrant de cette plénitude qui ne vient ni ne part.
Nous suivons ces étapes de la méditation méthodiquement, avec beaucoup d’énergie et l’aide d’un enseignant. Quand on atteint l’état de non question, le dharma naturel peut être proclamé.
Alors nous commençons à sentir, sans égoïsme, que nous devenons roi de l’univers. Parce que vous avez atteint une compréhension de l’impersonnalité, vous pouvez devenir une vraie personne. Cela ressemble à un voyage. D’abord vous avez à ne rien devenir, puis vous êtes capable de devenir quelqu’un. Vous commencez à développer une énorme confiance, sans doute et sans prétention. Cette étape est appelée illumination, ou éveil au sens ultime. Dès le début, l’éveil a été cultivé par la présence, l’acuité et la sympathie envers soi et autrui. Finalement, nous atteignons un état où il n’y a plus aucune question d’aucune sorte. Nous devenons une partie de l’univers.
Merci Wangmo d’avoir traduit ce passage vivant, précis, plein de douceur et d’enseignement.
Merci Wangmo,
Très heureuse de te retrouver le jeudi, dans ce nouveau lieu.
La conférence des oiseaux me touche beaucoup,
Bien à toi,
Annie