A chaque pas accéléré
de ce jour-là
la
buse méditait sur
le piquet de
la clairière
sauvage et fermement
assurée d’un envol
à l’arraché vertical de
mon approche –
venait sur la route à
la peau de vieille dame
en noyau de pêche
un troupeau de vaches
à la tête bêcheuse –
je m’écartais au
sillon d’un bas côté et
laissais passer le
flot désordonné
et muselé –
A chaque pas accéléré
de ce jour-là
des armées de
peuples décimés
hantaient les cimetières de
maïs et répondaient aux
gravillons sonores des
chasseurs –
le ciel ouvert
attirait dans mes yeux
des gerbes de fleurs miel et
or – je claquais des
mains pour faire fuir
les daims au sang blond –
je rêvais de vies sauvées
au dédale des houblons –
en une seconde le
nylon d’un nuage m’avait
emmené loin au
vestiaire des contemplations –
les poupées au
creux des arbres avaient
de grosses paupières au
bombé de pétales de rose –
le temps avait lacé ses
ballerines autour de
mon cou – je me promenais
d’une rive à l’autre –
hors du temps s’il
est possible d’imaginer
passer entre les barreaux
du corps –
la fleur boudait le papillon
alors qu’une petite balle de
soleil me tapait en
plein coeur –
je marchais sur la route
ce jour-là
un pas accéléré comme
un typhon prémonitoire
caché sous la pile des
pensées –
la
buse méditait
alors que je passais – le
souffle de son aile rasait
ma joue d’un
impeccable rapt –
les arceaux
de ma colonne dressés je
suivis du regard l’apnée
de ses coups dans la
magie du vent –
soudain
je désirais devenir
buse au vent mauvais –
A mon pas accéléré
ce jour-là
le monde se concentrait
en la fissure d’un feu
si invisible et vieux
qu’il ressemblait au
sourire d’un
nouveau-né –
je revenais en arrière
la route était neuve
sans possession aucune
et belle d’un libre osier
qu’il me plut de te dédier
dans le silence de
la lumière –
je regarde souvent les buses tournoyer dans le ciel
elles sont portées par les ascendants
leurs cris aigus si particuliers colorent ces mouvements circulaires
c’est rassurant de les entendre et de tourner avec elles très haut
souvent elles s’approchent un peu trop près des nids de corbeaux
les corbeaux déclenchent l’alerte et c’est le combat aérien assuré
les buses se retournent sur elle mêmes et présentent leurs serres redoutables
à l’assaillant
les corbeaux sont très courageux et les buses ne sont pas agressives
elles ne font que que se protéger du bec tout aussi acéré de ces gros oiseaux noirs
les buses finalement abandonnent le combat et les corbeaux regagnent
leur canopée
les buses gagnent de l’altitude très profondément dans le ciel et accrochent des vents proches de la vitesse du songe
le songe de cet aviateur qui voulait atteindre la vitesse du songe
sa machine se désintégra bien avant que le ciel s’ouvre
une longue-vue qui passait par là aspira ce songe effréné
l’enfant contemplait un combat aérien
des appareils tombaient en flammes le jeune garçon était fasciné
John lui continuait sa sale besogne d’aviateur
c’était la guerre avec son permis d’assassiner
cette culpabilité
il la désintégra à la vitesse du songe
croyant se libérer de cette dette
suicide supersonique qui atterrit dans la longue-vue de l’enfant
tout un réseau de dettes s’exprimait dans la violence de l’oncle
bombardier qui balançait les bombes à la main par dessus
bord d’un biplan piloté par cet aviateur qui ne savait plus de quelle guerre
il s’agissait